Les insectes et le temps

Le temps qui passe est une préoccupation que nous avons tous, même les insectes. Le temps que nous devons travailler, le temps de sommeil idéal, l’espérance de vie ou encore l’âge. Il peut s’agir de la préoccupation du temps immédiat afin de savoir ce que nous allons faire dans notre journée ou alors du temps plus lointain en pensant à qui nous serons d’ici 10, 20 ou 50 ans. Le temps conditionne nos vies. Les minutes, secondes, heures, années que nous vivons ont une fonction, une utilité biologique et physiologique. Le temps est ainsi, le plus souvent lié à la gestion de notre croissance, de nos ressources alimentaires, de notre environnement, de notre reproduction et de la vieillesse.

Temps de vie, cycle de vie, durée de vie des insectes

La vie d’un insecte est découpée en différentes « petites vies ». Un papillon, avant de devenir adulte passera par quatre grands stades de sa vie et chaque stade ; œuf, chenille, chrysalide ou imago (adulte) représente des phases de développement différentes et des durées différentes.

Le cycle de vie, une gestion du temps en plusieurs étapes.

Chaque durée de vie est dépendante de multiples conditions environnementales (température, humidité)ou nutritionnelles (énergie acquise, ressources de nourriture disponible). De plus, cela peut être lié à la reproduction (vierge, accouplé, femelle qui a pondu ou non) ou encore à la pression de prédateurs.

L’un des insectes les plus étudié en laboratoire est la mouche drosophile (Drosophila melanogaster). Dans des conditions d’élevage où température, humidité et nourriture sont contrôlées, le cycle de vie, ou le temps de génération (d’œuf à œuf), est d’environ deux semaines à 22°C et quatre semaines à 18°C.

Il existe aussi de grandes disparités entre les insectes. Parmi les plus rapides, un puceron (Rhopalosiphum prunifolia) a par exemple un cycle de vie complet d’environ cinq jours à 25°C. Au contraire, parmi les plus lents, il y a des espèces de cigales américaines. Dites périodiques, passent elles la plupart de leur vie sous état larvaire et émergent du sol tous les 13 ans (Magicicada tredecim) ou 17 ans (Magicicada septemdecim, M. cassini, M. septemdecula). Une fois sorti, elles peuvent se métamorphoser, se reproduire et mourir ensuite en quelques semaines. Cet exemple des cigales permet de voir que certains stades ne durent pas autant que d’autres. C’est aussi le cas pour les éphémères, dont une espèce (Dolonia americana) ne vit que cinq minute à l’état adulte. Ce temps très limité, ils doivent le mettre à profit pour se reproduire et pondre (pour la femelle) afin d’assurer leur descendance.

Cas particulier des insectes sociaux

Les insectes sociaux et la gestion différente du temps. (De haut en bas et gauche à droite, abeille, fourmis, termites et guêpes)

Les insectes sociaux, qui vivent en colonie autour d’une reine ou d’un couple royal, tels que les abeilles, fourmis, termites ou guêpes, ont une gestion du temps encore différente des autres insectes. Les grands stades de développement sont quasiment les mêmes (œuf, larve, nymphe et adultes) entre la reine d’une colonie d’abeilles ou de termites et leurs ouvrières mais les temps de vie sont différents. Chez les abeilles par exemple, la reine a une durée de vie de quatre à cinq ans environ, une ouvrière ne vit que quelques mois en hiver ou quelques semaines en été. Le faux-bourdon, le mâle, a lui une durée de vie courte. En effet, il meurt après s’être accouplé à la reine ou après être chassé de la ruche à la fin de l’été, même s’il ne s’est pas accouplé. Cette différence notable entre la reine et les ouvrières est en grande partie expliquée par le mécanisme de reproduction de ces insectes. La reproduction étant assurée uniquement par la reine, sa durée de vie plus longue permet de faire vivre la ruche dans son ensemble plus longtemps. Cela malgré la durée de vie plus courte des ouvrières individuellement.

Asticots, mouches et criminologie

Les mouches, aides criminologues de premier plan.

Saviez-vous qu’il existe tout un champ disciplinaire qui étudie les insectes en criminologie ? Cela s’appelle l’entomologie médico-légale. Car oui les insectes peuvent nous donner des indices précieux sur les scènes de crimes par exemple. Certains insectes dits nécrophages pondent, se nourrissent et/ou se reproduisent autour de cadavres. Ce n’est pas très ragoutant mais cela fait partie du cycle de la vie. La décomposition naturelle des corps d’animaux en milieu naturel par exemple est un processus qui fait intervenir de nombreux acteurs. Par exemple, parmi ces acteurs il y a les insectes, les petits mammifères ou encore des bactéries et champignons. Les mouches par exemple, font partie des premiers intervenants dans le processus de décomposition. Ainsi, connaissant les cycles de vie de ces insectes, les experts scientifiques sont capables de déterminer, avec quelques données physiques telles que la température et l’humidité, une date probable de décès d’un individu. L’étude précise des cycles de vie et des temps de développement de chaque stade dans différentes conditions environnementales des mouches et autres insectes nécrophages sont alors des aides précieuses pour la criminologie.

N’oublions pas que bien que pour nous la vie d’un insecte ne représente que quelques heures, jours ou semaines de notre propre vie, à l’échelle d’un insecte cela représente une vie entière !

Références bibliographiques :

Bruno, D. (2006). Le temps des insectes. Insectes 143, 15–18.

Anne Sverdrup-Thygeson. (2018) Insectes, un monde secret : sans eux nous ne pourrons pas vivre. Editions Arthaud. ISBN :978-2-0814-5226-8.