Pourquoi aimons-nous les abeilles et détestons-nous les guêpes ?

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Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi aimons-nous autant les abeilles et si peu les guêpes ?

Une étude de Sumner et collaborateur publiée dans le journal Ecological Entomology en 2018 a tenté de répondre à cela en interrogeant 750 personnes sur la perception qu’ils ont des insectes, incluant les abeilles et les guêpes.

Les guêpes, ces insectes dont on n'imagine pas la grande diversité

Si je vous dit « Oh regardez, il y a une guêpe ! », que faites-vous ? Vous courrez ou pire vous voulez vite l’écraser !! Mais pourquoi ? Que vous a-t-elle donc fait ?

D’ailleurs, si je vous dit « guêpe », vous penserez j’imagine à celle qui vient sur nos tables de pique-nique estival, boire dans nos cocktails bien sucrés. Cette guêpe commune, rayée jaune et noire s’appelle Vespula vulgaris. Elle fait partie de la sous-famille des Vespinae, qui compte environ 67 espèces. Dans cette sous-famille, ce sont toutes des guêpes sociales (vivant dans des nids de plusieurs dizaines d’individus issus d’une même reine), et l’on peut retrouver dans la super-famille qui la comprend, celle des Vespidae, les frelons européens (Vespa crabro) et asiatique (Vespa velutina).

Mais le monde des guêpes ne se résume pas aux guêpes communes et frelons !

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Répartition du nombre d'espèce de guêpes selon leur mode de vie (parasites, solitaires ou sociales) et sous-famille (Vespines, guêpes sociales les plus connues du public)

Sur le graphique ci-dessus, vous pouvez aisément voir que l’ensemble des guêpes sociales (incluant les Vespinae) représentent seulement 850 espèces environ comparées aux presque 75 000 espèces de guêpes solitaires (sans grosse colonie) et 650 000 espèces de guêpes parasites (qui utilisent un autre animal comme hôte de nidification) qui sont actuellement connues dans le monde.

Imaginiez-vous qu’il existe autant de guêpes ? Normal, si peu d’entre-elles nous approchent.

Nos émotions face aux insectes

« Si vous voyez l’un de ces insectes, que ressentez-vous? » Telle a été la question posée aux participants de l’étude de Sumner, et al, 2018.

Il leur a été demandé de placer sur une échelle leurs émotions. L’émotion est considérée fortement négative à -5, et faiblement négative à -1, neutre à 0, faiblement positive à +1 et fortement positive à +5.

Voici les résultats de l’étude concernant les 4 principaux insectes ici représentés : la guêpe (wasp en anglais), l’abeille (bee), la mouche (fly) et le papillon (butterfly).

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Graphique en violon, issu de l'étude de Sumner, et al, 2018, montrant la valeur émotionnelle que les personnes interrogées attribuent aux guêpes (wasp), abeilles (bee), mouches (fly) et papillons (butterfly).

Sur ce graphique, nous pouvons voir que l’abeille et le papillon ont des scores très majoritairement positifs, supérieurs à +1.5, indiquant que les participants ont des émotions très positives à la vue de ces insectes. Au contraire, pour les guêpes et les mouches, les scores sont sous la barre du neutre et indiquent majoritairement des émotions très négatives envers eux.

Pourquoi aimons-nous moins les guêpes et les mouches que les abeilles et les papillons ?

Quelles sont ces émotions négatives ou positives ? Quels mots les participants ont utilisé pour décrire ces insectes ?

Des mots sur les ressentis envers les insectes

Il a été demandé aux participants de donner 3 mots décrivant chacun des insectes ici mentionnés afin de mieux comprendre pourquoi des tels scores ont été attribués.

Et vous, si vous deviez décrire une abeille et une guêpe, quels sont les mots que vous utiliseriez ?

La liste des mots originaux (donc en anglais) issus de l’étude de Sumner et al, 2018, a été compilée en ces nuages de mots ci-dessous, montrant proportionnellement la récurrence de ces mots dans la liste. Ainsi, plus le mot est écrit en gros, plus il a été utilisé par les personnes interrogées.

Deux salles, deux ambiances.

Comme l’indiquait l’étude des émotions ressentis, les mots utilisés pour décrire les guêpes et la mouche sont négatifs. Ainsi le mot qui ressort concernant les guêpes est le mot « STING », qui en anglais peut signifier ici le DARD, la PIQÛRE et l’action de PIQUER. Ensuite sont mentionnés les mots « NEST » qui signifie le nid et  « ANNOYING » signifiant qu’elles nous dérangent. Le même mot « ANNOYING » a été majoritairement utilisé pour décrire les mouches, tout comme les mots « BUZZ » pour le bruit quelles font en volant et « DIRTY » signifiant SALE, SALETE. 

Pour les abeilles et les papillons, des mots très positifs sont alors décrits. L’abeille est mentionnée pour son « HONEY » soit le miel, le « POLLEN » et les « FLOWERS », les fleurs. Ici aussi le mot « BUZZ » est employé pour le bruit de leur vol. Les papillons sont « PRETTY » et « BEAUTIFUL », deux mots pour décrire leur beauté, « COLOURFUL » pour leurs couleurs et « WINGS » pour leur ailes.

Il ressort de ces définitions, que les abeilles sont connues du public pour leur miel, les papillons pour leur beauté alors que les guêpes nous piquent et les mouches sont sales et nous dérangent. C’est un constat assez triste pour nos amies les guêpes qui pourtant ne sont pas là pour simplement nous piquer, nous humains. Le constat est identique pour ces pauvres mouches qui sont pourtant loin d’être sales, c’est un préjugé !

Quels sont les rôles des guêpes dans la Nature ?

Si je vous pose la même question pour les abeilles votre première réponse serait probablement le MIEL, tout comme dans l’étude. Or, produire du miel n’est pas le rôle principal des abeilles, car 1 seule espèce d’abeille le produit, celle que nous élevons pour cela, parmi près de 1 000 espèces d’abeilles présentes en France. Ce qui se rapproche de cette production de miel, est la POLLINISATION. C’est en allant à la recherche du nectar et du pollen des fleurs, que ce phénomène se produit pour les plantes à fleurs (voir notre article sur le sujet ici). La pollinisation est aussi un des rôles des guêpes, mais pas le premier.

Les guêpes sont des PREDATRICES hors pair. Ce qui signifie qu’elles chassent leurs proies tels que des mouches, des chenilles, des araignées comme source de protéine. Les guêpes que l’on voit dehors, sont celles qui chassent pour nourrir leurs larves. Les larves sont celles qui se nourrissent de viande, contrairement aux adultes qui se nourrissent de sucre que les larves leur fournissent en retour.

Par leur chasse, les guêpes nous fournissent un service écosystémique gratuit dans la régulation des ravageurs. Sans elles nous serions envahis de mouches, chenilles, araignées et autres arthropodes.

Ainsi, les adultes eux se nourrissent de pollen et nectar des fleurs et chassent pour leurs larves, d’où leur rôle dans la pollinisation, ou leur présence sur nos cocktails sucré en été et sur le morceau de jambon de nos sandwichs.

Apprenons à connaitre les guêpes et nous les apprécierons

A la fin de leur étude, Sumner et collaborateurs, émettent l’hypothèse que nous n’aimons pas les guêpes, car nous ne comprenons pas assez les rôles qu’elles jouent dans la Nature. Ce que je trouve vrai et cohérent, pour tout autre insecte également.

Il est aussi montré, que parmi la communauté scientifique, les abeilles (pour la valeur économique qu’elles représentent) et le moustique (pour les maladies qu’ils transmettent) sont beaucoup plus étudiés que les guêpes malgré les services qu’elles rendent…

Le plus souvent nous dénigrons ou n’aimons pas ce que nous ne connaissons pas bien. Alors, n’hésitez-pas à en apprendre plus sur ces insectes, vous allez vous surprendre à les aimer !

Références bibliographiques :

Seirian Sumner, Georgia Law and Alessandro Cini. (2018). Why do we love bees and hate wasps. Ecological Entomoloy 43, 836–845. doi:10.1111/een.12676

Seirian Sumner. (2020) Do not swat the wasp! Frontiers for Young Minds 7:149. doi:10.3389/frym.2019.00149